Projet de réforme fiscale, à quoi s'attendre ?
On en parle depuis des mois, cela a déjà fait couler beaucoup d'encre et surtout beaucoup de gros titres dans la presse, mais à quoi doit-on vraiment s'attendre ?
Il est difficile aujourd'hui de se positionner de manière ferme car, comme on a déjà eu l'occasion de le voir par le passé, le texte final peut subir de grosses modifications par rapport au projet en fonction de l'influence politique des différents partis. Et comme dans un gouvernement arc-en-ciel on ne manque pas d'avis divergents, on pourra peut-être avoir quelques surprises, ...
J'attire cependant votre attention sur le fait que le projet de réforme se veut budgétairement neutre. Donc il y aura des gagnants et bien entendu des perdants. Force est donc de constater que le gouvernement n'a donc pas prévu de réforme dans laquelle il investit à court terme afin de récolter les fruits à long terme. Ceci étant donc contraire à toute bonne politique d'investissement ou de gouvernance. Devons-nous être surpris d'un telle attitude de nos politiques ? Je ne le pense pas étant donné que nous constatons avec regret, jour après jour et année après année, que la "SA BELGIQUE" est gérée "à la petite semaine" en fonction de l'électorat et non en fonction de la pérennité.
Faisons cependant le point sur ce qui est connu des projets actuels :
- Proposition d'adapter les barèmes fiscaux à l'IPP : la première tranche exemptée d'impôt sera relevée, une réduction des taux sera proposée, une tranche d'imposition complémentaire sera ajoutée. Cette mesure va donc clairement avantager toute une série de travailleurs qui verront leur imposition directe diminuer. Mais ... la réforme a pour but de supprimer les avantages fiscaux liés aux formes de rémunérations alternatives. Mon but n'est pas de les détailler ici mais pensons aux voitures de sociétés, aux stock-options, aux éco-chèques, chèques sport & culture, aux frais propres employeurs, ... Donc la classe moyenne et supérieure devrait donc être la plus touchée. Or c'est déjà cette classe moyenne et supérieure qui est déjà lourdement taxée à l'heure actuelle et qui le sera encore plus demain ... Mais c'est un autre but de la réforme : redistribuer la richesse vers les salariés percevant des revenus inférieurs. Autrement dit encourager l'attitude : "moins vous faites et plus vous recevrez". Ce n'est clairement pas une culture de la gagne. Bien que je salue l'idée de moins taxer les salaires les plus bas, je déplore le manque de créativité gouvernementale.
N'aurait-il pas été intéressant de créer, par exemple, un Tax Shelter de la transition énergétique afin d'inciter les revenus les plus aisés à investir dans notre avenir et sur le long terme ? En effet, il est stupéfiant de voir que l'épargne sur les comptes à terme n'arrête pas de gonfler (nous en sommes à ce jour à 300 milliards d'euros. Quelqu'un se posera-t-il un jour les bonnes questions dans l'équipe gouvernementale ? Personnellement je pense que nos politiques n'ont pas les yeux en face des bons trous.
Vous trouverez ci-dessous les nouveaux barèmes proposés et que Trends Tendances a publié récemment :
- Le taux d'impôt des sociétés serait revu à la baisse. On parle d'une taxation à 15% sur les 200.000 premiers € de bénéfice pour les PME.
- Taxation des briques : la note prévoit un taux de taxation unique (25%) pour les revenus du patrimoine mobilier et immobilier. Les revenus moyens qui ont investi dans des immeubles de rapport afin de compléter leurs revenus ou leurs pensions vont donc devoir passer à la caisse. C'est un changement catégorique dans notre fiscalité belge. Ne fallait-il pas prévoir cela autrement pour les investissements futurs afin d'éviter, indirectement, les effets rétroactifs d'une loi et pénaliser de la sorte des personnes qui ont investi dans un certain cadre juridique (et certains durant toute leur vie professionnelle). Personnellement, je trouve que ce genre de mesure lamentable et démontre à quel point notre système fiscal souffre d'une instabilité juridique totale.
- Les plus-values immobilières seraient taxées à 15% alors que les transactions immobilières sont déjà lourdement taxées (droits d'enregistrement, droits de succession).
- La mise à disposition d'un logement par une société à son dirigeant sera taxée sur base de la valeur réelle et donc plus sur base de la formule actuelle reposant sur le revenu cadastral de l'immeuble.
- Les plus-values mobilières deviendraient également taxables mais avec au taux de "réduit" de 15%. Ici aussi l'effet rétroactif pourrait se révéler catastrophique pour certains. Imaginez un entrepreneur qui a capitalisé les bénéfices reportés de son entreprise afin de s'assurer un revenu confortable à partir du jour de la cession de son entreprise. le voilà "volé" de manière tout à fait légale ! Ici également pourquoi ne pas prévoir un régime futur afin d'éviter de pratiquer un hold-up légal sur le passé. Personnellement, et outre le fait que certains seront gagnants et d'autre perdants, je déplore ce genre d'attitude qui est totalement irrespectueuse en terme de sécurité juridique.
En conclusion, tout ceci me semble assez absurde alors que la Belgique figure, selon le rapport de l'OCDE, parmi les pays où le patrimoine est le plus taxé.
Plutôt que d'imaginer de nouvelles taxations, nos dirigeants ne devraient-ils pas plutôt s'afférer à trouver des solutions durables ? Sur les réseaux sociaux, je vois de plus en plus de commentaires par rapport au coût de la vie qui devient trop cher et qu'une des solutions prônées est la révolution. Est-ce que ce n'est pas le rôle des politiques de se pencher sur ce genre de question cruciale ?
Rudi Vandrepotte.